Témoignages

Je m'appelle R. Je viens d'Albanie où j'habitais à D., une ville magnifique située juste à côté de la mer. Ma maison était à 200 m de la plage, vous imaginez ?

En février 2018 je suis tombée malade. On m'a diagnostiqué un cancer du sein. Malheureusement, dans mon pays, la qualité du système de soins et la corruption font que je n'aurai pas été bien soignée. J'ai donc décidé de partir pour l'Italie. J'y suis restée deux mois mais je n'étais pas bien prise en charge. Alors, sur les conseils de ma fille qui fait ses études à Épinal, j'ai décidé de rejoindre les Vosges.

En France, j'ai eu la chance d'être très bien soignée. J'ai été suivie à Nancy puis à Épinal. Quand j'ai fait ma demande d'asile pour raison médicale, on m'a logée à Neufchâteau. C'était dans un centre où résident des personnes SDF et alcooliques ; la vie y était très difficile, surtout avec la maladie.

Il y a quelques mois, j'ai été transférée à Mirecourt. Je suis logée dans un appartement avec six autres femmes. Nous sommes de sept origines différentes, avec des cultures très diverses. De ce fait, nous n'avons pas toutes le même rapport au ménage, à la propreté… Nous n'avons pas les mêmes manières de vivre. C'est difficile au quotidien. Le plus fâcheux, c'est que nous n'avons qu'une seule toilette pour sept…

J'ai rendez-vous avec l'OFPRA(1) le 24 décembre prochain à Paris. J'espère qu'il me diront que je peux rester en France. Mon premier recours pour raison médicale a été rejeté par l'administration car, selon eux, j'aurais dû soigner mon cancer en Albanie. J'aurais aimé leur répondre que laisser sa terre, sa vie, sa famille et ses amis était une chose très difficile. On ne le fait jamais par plaisir. Si je voulais survivre je n'avais pas le choix…

En janvier 2019, je me suis faite opérer. On m'a retiré un sein. Depuis, j'ai toujours beaucoup de douleurs et je ne dors pas beaucoup. J'ai le bras qui gonfle et ça me fait mal. J'ai beaucoup de séances de kiné et j'ai encore souvent des examens à réaliser pour surveiller l'évolution de la maladie. Je ne suis pas encore guérie.

J'aimerais pouvoir rester en France auprès de ma fille. Malheureusement, je ne suis pas certaine que ma demande aboutisse. J'ai encore de nombreux rendez-vous avec l'oncologue au cours de l'année prochaine, mais je ne sais pas si je pourrais y aller.

Même si je dois mener à la fois ma demande d'asile et le combat contre ma maladie, seul le cancer m'angoisse. Ma grande inquiétude, c'est de ne pas réussir à guérir. Heureusement, les médecins français sont très bien. J'ai été tellement bien prise en charge.

(1) Office français de protection des réfugiés et apatrides.